Parcours – Rosemary Bailey, grande voyageuse, écrivaine, tombée sous le charme des Pyrénées.
Quiconque a déjà contemplé le Canigou, sommet des Pyrénées Orientales (2785m), dominant dans un superbe isolement la plaine du Roussillon puis la Méditerranée, un peu à la manière du Mont Fuji, comprendra aisément la fascination ressentie par Rosemary Bailey, dès lors qu’elle échoua par hasard sur son flanc.
Elevée au rythme des sermons de son pasteur baptiste de père, Rosemary prend vite le large et entame une vie de hippie, qui la mènera à Londres où elle devient journaliste. Elle rencontre son adorable mari Barry Miles, écrivain comme elle, et part pendant plusieurs années au cœur de Manhattan avant de revenir vivre à Londres où elle écrit plusieurs guides touristiques, notamment un National Geographic Traveler Guide to France, son pays de prédilection.
Sur un coup de coeur, ils achètent en 1988 Corbiac, un monastère en ruine dans une vallée idyllique des Pyrénées Orientales au-dessus de PradeS. Commence alors l’incroyable aventure de sa restauration, par ce couple d’Anglais intellectuels bohêmes vivant exclusivement de leurs revenus erratiques d’écrivains, bredouillant à peine le Français…
Au début, ils ne se rendent à Corbiac que pendant les vacances. C’est la période de la découverte passionnée de l’histoire du monastère et de la région, des rencontres avec les paysans Catalans. Ils campent dans le monastère dont la toiture fuit de toutes parts. Ils sont encore sans enfant, et consacrent leurs quelques économies à tenter de retrouver la splendeur passée de la bâtisse romane. Ils réalisent peu à peu l’ampleur de la tâche qu’ils ont entreprise…
En 1990, « life, death, and the whole damn thing intervened with a vengeance ». Coup sur coup, Rosemary accouche de son petit Théo, perd son père, et découvre que son frère, également pasteur, homosexuel, se meurt du SIDA. Loin d’être scandalisée, la petite paroisse minière du Yorkshire où il officie se ligue pour le soutenir, le veiller et lui assurer une fin décente. L’histoire donne lieu à un documentaire TV pour lequel elle écrit un article dans The Independent. Rosemary ressent alors puissament le besoin de témoigner de la vie et du courage de ce frère si différent d’elle. Elle entame alors son premier roman, Scarlet Ribbons : A Priest with Aids, qui sera publié en 1997 (chez Bantam Books, comme tous ses autres livres).
C’est le déclic, elle décide de s’installer à Corbiac pour y élever son enfant et y écrire son livre. Un ami leur prête de l’argent pour refaire la toiture, Théo se rend à l’école du village, et la famille s’installe de façon permanente à l’ombre du Canigou. La suite est décrite avec humour et vivacité dans le second roman de Rosemary «Life in a Postcard ». Publié en 2002, vendu à 25.000 exemplaires, ce sera un bestseller du Sunday Times.
L’aventure prend fin en 2003, quand les nécessités professionnelles et scolaires rendent le retour à Londres indispensable. Théo est scolarisé au Lycée, Miles retrouve avec soulagement les joies citadines, mais Rosemary est restée sous l’emprise du Canigou, de la fraîcheur et de la pureté de l’air des montagnes catalanes. Son dernier roman, qui vient d’être publié, s’intitule «The Man who married a mountain, a journey through the French Pyrenees ». Elle y retrace le parcours de l’eccentrique comte Henry Russell (1834-1909), un aristocrate franco-irlandais né à Pau et pionnier du Pyrénéisme (il gravit tous les sommets de la chaîne, certains à plusieurs reprises). Selon Rosemary, le Pyrénéisme (féminin) se distingue de l’Alpinisme (masculin) par son côté contemplatif, traduisant plus l’amour de la montagne et de la nature que l’attraction de l’exploit sportif. Conçu comme un parcours à travers la chaîne montagneuse, depuis la Catalogne jusqu’au Pays Basque, le livre fait revivre toute une époque disparue, quand Pau était à égalité avec Nice comme lieu de villégiature pour la haute société anglaise. On y rencontre des personnages hauts en couleurs, montagnards, explorateurs, aristocrates, qui ont en commun d’avoir vécu les passionnants débuts de l’exploration des sommets montagneux. Rosemary avait aussi à cœur de faire découvrir les écrits (tout en français) de l’extraodinaire Henry Russell, à la fois gentleman, grand montagnard, grand voyageur, polyglotte, poète, et notamment son chef d’œuvre tombé dans l’oubli, Souvenirs d’un Montagnard (épuisé).
Guylaine Amyot.
l’Echo. Revue de Lycée francais Charles de Gaulle, Londres
Extrait de l’œuvre Vivre dans une carte postale. Evasion dans les Pyrénées Françaises
“Je me réveille avec le soleil qui fait jaillir de l’or sur un mur en pierre. Si je me penche par la fenêtre, je vois le Canigou fraichement sauproudré de neige. C’est merveilleux de vivre dans un résidence qui a des fenêtres de tous côtes, de voir chaque jour non seulement le lever mais aussi le coucher du soleil et d’être en permanence consciente du passage du soleil et de la lune.”
En 1988 Rosemary Bailey et son mari voyagaient dans les Pyrenées Francaises lorsqu’ils sont tombés amoureux d’un monastère mediéval en ruine qu’ils ont achetés par la suite; il était entouré de vergers de pêchers et de montagnes couronnées de neige. On voyait partout des traces du passage des moines partout, dans les fresques de la chapelle du 13th siecle, dans la crypte enterrée et dans les arches en pierre du cloître. Peu à peu, tous ces fragments ont commencé a mettre en lumière l’âme de ce lieu.
Pendant les années suivantes le couple rentrait à Corbiac aussi souvent que possible et en 1997 où ils se sont jetés à l’eau. Ils ont quittés le centre de Londres pour s’installer au coeur de la France rurale avec leur fils alors âgé de 6 ans. Ecrivains independants, ils ont installés leurs ordinateurs Macintosh dans la pièce la moins humide de la maison et ont envoyés Theo, leur fils, a l’école du village. Ils se sont mis à restaurer le monastère d’une facon imaginative et résolue. Leur rêve était de rendre au monastere sa splendeur initiale Un rêve dont la realisation a mis à l’epreuve les rapports entre les deux et aussi leur endurance. Et enfin ils se sont inspirés de la petite communauté de montagne qui les avait accueilli. si chaleureusement.
La Vie dans une Carte Postale” de Rosemary Bailey n’est pas seulement le recit captivant du defi de la vie quotidienne dans un petit village de montagne. C’est aussi l’exploration de la beauté sauvage de la Catalogne Francaise, le coin de France le plus au Sud, et ces la célébration des plaisirs de la cuisine Catalane et d’une autre monde peu connu mais souvent magique.
Les amis du « pot de lait »
Le village était en crise. Début 2001, alors que la fièvre aphteuse ravageait la Grande Bretagne et qu’on la soupçonnait aussi en France, une des vaches laitières de Nénès et Isabelle réagit positivement aux tests de la brucellose. Pendant quelques semaines, il n’y eut plus de tournée de lait, et bientôt la nouvelle tomba : le troupeau entier devait être abattu.
Trente vaches qui avaient été amoureusement soignées, traites à la main deux fois par jour. Les gens allaient chercher le lait dans le petit atelier d’Isabelle dans le village, ou bien elle faisait sa tournée, toujours amicale et souriante, avec sa voiture bleu pâle, extraordinairement propre pour Mosset. Avec sa peau aussi blanche que son propre lait, ses yeux noirs, on aurait dit que, sortie d’un tableau de Fragonard, elle était allée directement se mettre dans ses shorts coupés et ses bottes de cow-boy.
Leurs vaches étaient de grosses laitières noires et blanches des Vosges, venues du nord de la France, comme Nénès. Pendant les mois d’été, les vaches restaient dans les pâturages de montagne, et lui passait le plus clair de son temps avec elles. En hiver, elles pâturaient parfois dans le pré à côté de la rivière, en face de Corbiac, et j’aimais voir de ma fenêtre ces vaches qui me fournissaient le lait pour mon muesli quotidien. Il fallait les nourrir en hiver, et parfois je croisais Nénès sur la route, avec d’énormes balles de foin de chaque côté de son tracteur, roulant bien au-delà de la limitation de vitesse. Avec ses cheveux blonds en longues mèches sauvages et sa peau tanné, on aurait dit un croisement de Keith Richard des Rolling Stones et de Mowgli.
Ils étaient terrassés par le sort de leurs chères vaches. Elles ne constituaient pas seulement leur gagne-pain, ils étaient épris de leurs bêtes et les connaissaient chacune par son prénom : Lucette, Hirondelle, Jacinthe, Jolie, et les autres. Ils étaient « totalement ruinés », comme disaient les villageois en secouant tristement la tête. Nénès et Isabelle quittèrent Mosset pour retourner temporairement dans les Vosges, dans le village natal de Nénès, avec leur jeune fille Marie.
Plus de lait frais sur le pas de la porte, plus de yaourt avec le miel, plus de Nénès faisant la course sur son tracteur.
C’était un coup terrible. Ils avaient constitué leur troupeau à partir de presque rien, après avoir reçu leur première vache comme cadeau de mariage. Le village aussi était perturbé, pour eux bien sûr, mais aussi pour l’entreprise qui symbolisait la renaissance du village. En tant que couple, ils avaient réussi l’union du Mosset traditionnel et des nouveaux arrivants.
Quelques semaines plus tard, j’aperçus une affiche à Mosset : « Les amis du pot de lait ». Un groupe de villageois et d’étrangers avait organisé une quête pour Nénès et Isabelle. L’initiative évolua rapidement et on se tourna vers l’organisation d’une soirée avec une tombola et des prix. Alain, le chef, et son épouse Marie-Christine s’offrirent pour préparer une paella pour 50 F par personne, et offrir le bénéfice. Il y eut quelques râleurs, qui murmurèrent qu’il y avait d’autres éleveurs avec des problèmes et que personne n’avait jamais rien fait pour eux. « Que ferez-vous, la prochaine fois qu’un éleveur devra tuer ses vaches ? ». Mais personne ne s’en inquiéta. Il y avait une grande agitation pour la préparation de l’événement ; cependant tout était tenu secret, en attendant le retour d’Isabelle et de sa famille des Vosges.
Ce matin-là, le printemps se leva doux, tiède, le ciel bleu et les oiseaux chantant, et Lettie et moi allâmes cueillir des fleurs pour décorer la Salle Polyvalente. Le mimosa était exubérant, avec ses petites grappes de boules jaune vif parfumant l’air de son odeur étrangement exotique, offrant au paysage de brillantes tâches jaunes. Quand nous arrivâmes, chargées de branches fleuries, la salle bruissait déjà d’activité.
Henri, le chasseur, et Monique étaient en train d’étiqueter les prix de la tombola et la sono était déjà prête. Nous remplîmes tous les vases possibles, pots à lait ou casseroles, avec de l’eau, et les garnîmes de fleurs. Véronique, la brune et jolie maman belge de Guillaume, plaçait délicatement de petits rameaux de mimosa sur les tables. Cherchant un balai, je rencontrai Hans dans la cuisine, grattant et nettoyant vaillamment des moules pour une cinquantaine de personnes, et bredouillant son étonnement sur la communauté qu’il avait rencontrée : « C’est la solidarité ! » disait-il avec son rugueux accent hollandais, et on aurait dit qu’il allait gratter avec joie des tonnes de moules.
Vers 18.30, il y avait au moins 200 personnes, toutes buvant du pastis, du muscat, du vin et des jus de fruits, avalant des morceaux de pizza et de délicieuses tartes, des tranches de salami ou de pâté avec du pain, achetant des billets pour la tombola et parlant à la fois. Les dames âgées du village, qui avaient sorti leurs robes fleuries pour l’occasion, frayaient avec d’anciens hippies descendus de Cerdagne avec leurs sacs à dos, flûtes en bois et manteaux en peau de mouton, comme s’ils arrivaient tout droit d’un tipi enfumé. Skall discutait avec Louisette de ses souvenirs lorsqu’elle montait avec les troupeaux dans les vieux cortals ; un vieux édenté, avec béret et espadrilles, essayait de me parler, avec ce rugueux accent catalan que je comprends si difficilement, de quand il allait à l’école du village, et comme le maître était sévère en ce temps-là.
Il y eut une commotion lorsqu’un des chiens locaux attaqua un cabot en visite, et je faillis renverser mon verre de vin sur le maire dans ma précipitation pour échapper à ces deux bêtes boueuses, avant qu’elles ne fussent sommairement chassées.
Les pauvres Nénès et Isabelle arrivèrent, s’attendant à une fête du village, et durent résister vaillamment, avec un mélange d’embarras aigu et de gratitude, aux assauts et embrassades dont ils furent submergés.
La mosaïque de gens me semblait extraordinaire. Tous les âges, plusieurs nationalités : français, catalans, espagnols, hollandais, belges, algériens, chiliens, anglais. Il y avait des célibataires, des homosexuels, des lesbiennes, des divorcés, chacun avec son partenaire, enfants adoptés, enfants placés, même quelques rares familles conventionnelles. Des sobres et des buveurs, des fascistes et féministes, politiques et apiculteurs, éleveurs, agriculteurs, instituteurs, céramistes, propriétaires d’ânes, même un comptable, deux aides-comptables, un homme du monde, deux chirurgiens, trois végétariens… et cinq ou six ratons laveurs. Cela sans parler des écrivains, artistes, infirmières, menuisiers, maçons, bibliothécaires et jongleurs. Marie, la maîtresse d’école, était là avec son accordéon, André, l’apiculteur, avait un sourire béat, comme s’il venait d’avaler tout un pot de son propre miel ; Cathy, la solitaire, avec sa ménagerie, dans la montagne, parlait à Monique, l’assistante sociale, et caquetait en riant. A l’exception du forgeron et du cordelier, c’était comme le Mosset médiéval que les moines trinitaires de Corbiac avaient essayé, en vain, de dompter. Ils auraient pu construire tout un monde.
Il y avait trois maires assis en rang au fond de la pièce, rayonnants. René Mestres, ancien maire, Alain Siré le maire sortant, et le nouvel élu, Olivier Bétoin de La Coume. Il a d’habitude un sourire distant et courtois, mais ce soir on aurait dit qu’il avait gagné le gros lot. Pour Olivier, dont la philosophie est basée sur la participation, cette soirée représentait un début mémorable de son mandat.
A l’extérieur, Alain, le cuisinier, préparait la paella dans de grands plats, à ciel ouvert, et Marie-Christine servait. Monsieur Mestres coupait sa langoustine, l’air sérieux, avec le traditionnel couteau de poche. Henri fut un brillant maître de cérémonies lorsqu’on tira la tombola. Les artistes avaient été généreux : des tableaux d’Albert, de Bob et de Gwen, des céramiques de Bernard, Ludo et Lettie, des aquarelles, mais aussi des quantités de miel, de confitures, de gâteaux faits maison et des fruit confits. Au fur et à mesure que les gagnants étaient annoncés, des corbeilles de fruits défilaient, des dames âgées recevaient les oeuvres abstraites de Bob et d’Albert, et Véronique ramena à la maison un collage photo, œuvre de son compagnon.
Gérard avait dessiné une énorme vache sur un tableau placé au centre de l’estrade. La vache avait été divisée en morceaux numérotés qu’il coloriait au fur et à mesure que les prix de la tombola et les dons étaient annoncés. Gérard la coloria minutieusement en bleu, puis en rouge, puis en vert et finalement elle fut complétée. La soirée rapporta plus de 20000 francs. Vraiment, beaucoup de gens avaient participé, même un vieux éleveur âgé de 82 ans s’était glissé, un peu plus tôt, et avait mis son enveloppe dans l’urne. Isabelle prononça un bref discours de remerciements mais éclata bientôt en sanglots et fut réconfortée par Monique, la sœur de Nénès, pendant que nous pleurions tous : la mère d’Isabelle, Yvonne, et, à côté de moi, Marie-Jo et Eileen. Ce fut un moment unique, de catharsis. L’événement était important, autant pour le village que pour le couple. Je ne crois pas que qui que ce soit réalisât, lorsqu’il s’embarqua dans cette histoire, combien elle était importante pour eux en tant que groupe.
L’artiste franco-algérien, Michel, qui vient d’acheter un petit atelier dans le village, en haut-de-forme et queue-de-pie, réalisa un tour de prestidigitation avec un vieux gramophone et des 78 tours, après quoi les gens se levèrent et dansèrent. Marie joua de son accordéon, accompagnée de la guitare de Carole, et Hans s’essaya à la chanson française, mais il ne connaissait pas les paroles et devait les lire sur un bout de papier. Tout le monde se joignit à lui.
Les jeunes DJ’s ne pouvaient plus attendre et démarrèrent la musique. Margritte poussa le timide Pascal à danser. Pour une fois, ceux qui se cachaient craintivement à l’arrière de la salle ou se réfugiaient près du bar, étaient au centre de la scène. Les pères dansaient avec leurs filles, et les couples dansaient ensemble avec l’aisance d’une longue pratique.
Plusieurs garçons du village mimèrent un sketch, dansant en ligne et enlevant leurs chemises simultanément, sous les applaudissements et les cris de l’assistance. Je vis Theo dansant seul sur la scène, imitant John Travolta. Miles, son père, avait tout naturellement inclus « La Fièvre du Samedi Soir » dans le b.a.-ba de la culture contemporaine.
Je dansai avec un bonhomme distingué aux cheveux blancs que j’avais à peine salué d’un timide bonjour à la boulangerie ; il m’entraîna et me fit tourbillonner en s’exclamant : « La Dame de Corbiac ! ».
Charles, notre voisin militaire, arriva, bronzé, les cheveux blonds rasés, moulé dans un jean délavé. Parfois, on peut l’apercevoir au café du village en tenue complète de camouflage, accepté comme n’importe qui d’autre. Il a passé plusieurs années à Djibouti, suivies d’une mission au Kosovo. Lui aussi est un enthousiaste du village, du groupe. Il en a tant vu d’abîmés, de dévastés par la guerre, qu’il doit savoir.
Tous dansèrent pendant des heures, et ceux qui ne dansaient pas restaient assis à commenter, à boire et à manger, pour la deuxième ou la troisième fois, la paella qui se trouvait dans un grand plat posé sur la table.
Même les cuisiniers s’assirent pour manger. Je demandai à Alain si la ville, le bourdonnement de Marseille, ne lui manquaient pas. La réponse fut « pas du tout ». Lui aussi aimait, disait-il, la tranquillité de la montagne, échapper à la frénésie de la vie citadine. Il cligna des yeux et esquissa un geste de méditation, levant la jambe et la croisant sur son genou en imitant le geste de Bouddha.
Soudain, au milieu de tant de danses et de gaîté, il y eut un silence et la musique s’arrêta. Nénès était assis sur l’estrade, affalé sur un tabouret sous la vache peinte. Ses épaules étaient affaissées, ses cheveux blonds emmêlés autour de son visage. Il prit le micro et commença à parler très calmement. Il raconta la perte de ses vaches et son retour dans les Vosges, dans son village natal, pensant que c’était là-bas que se trouvaient ses amis, que peut-être il devrait s’y réinstaller pour travailler. Mais maintenant, disait-il, il réalisait qu’il avait aussi des amis ici, qu’il avait un village à Mosset, un village au grand cœur.